Bonjour,
J’ai
suivi le weekend du Tour Européen et du PGA Tour pour illustrer deux événements
qui me touchent de près. Je crois avoir fait du sport toute ma vie. Le sport
m’a aidé à me construire professionnellement et personnellement. Est venu le
moment de transmettre ce que j’ai appris du sport et de l’éducation.
Aucune
suffisance dans cette attitude, juste mettre des choses à leur place entre le
rêve et la réalité des batailles pour un bout de victoire. Le monde médiatique nouveau
fausse la réalité du monde dans lequel nous vivons.
Pour
notre sport favori, nous n’avons pas de locomotive. L’événement de la Ryder Cup
fera en son temps son effet mais l’effet escompté par la FFG au-delà de cette année
sera-t-il efficient ? J’ai déjà donné mon avis sur le mal que rencontre le
golf, dans le monde entier. L’enseignement tarde à se renouveler, il s’appuie
sur la seule logique technique du swing, du matériel, du physique. Une partie
du cerveau des joueurs est seulement sollicitée et avant que ce dernier
comprenne qu’il doit en faire plus pour être performant trop de temps a passé.
Il est dépassé chez nous en France plus que partout ailleurs.
Si
je prends les résultats secs des joueurs français du week-end à Oman, Pavon était
premier le soir du cut. Guerrier l’a remplacé le lendemain et Levy est venu
finir sur ses talons au dernier jour. Cela se passe souvent comme cela mais c’est
aussi ce sport qui veut ça. Les variables en sont multiples.
Qu’est-ce
qui manque donc pour gagner un tournoi comme le faisait un temps Tiger Woods, en
tête le vendredi ou samedi et vainqueur le dimanche. Il avait rassemblé toutes
ses forces et avait un temps d’avance sur ses concurrents. Son apprentissage
avait été différent.
Ce
qui est très significatif en ce début de saison, c’est de voir la progression
d’Alex Levy. Depuis qu’il est entraîné par Pete Cowen, ses statistiques ont
sensiblement augmenté dans tous les secteurs du jeu. Lui-même se dit plus
élève, intéressant à écouter. Nos entraîneurs nationaux ont dû eux aussi le
relever.
Travail
au Trackman (et sans doute au Sam Putt Lab), tout cela n’est rien que normal.
La course à l’armement passe par là, des objectifs affichés avec son coach et
un contrôle numérique. L’endurance mentale a une vertu, elle rend le jeu plus
automatique. La mémoire est à la fois dans le cerveau et dans les cellules
musculaires. La répétition engramme les mouvements et en conséquence augmente
le niveau de confiance en soi.
C’est
ce que l’enseignement n’explique pas aux enfants. Je crois que la pédagogie du
swing est bâtie sur un malentendu. C’est le joueur qui devrait le construire au
fur et à mesure qu’il en a besoin. Etre en mesure de poser les questions comme
le fait Alexander Levy pour continuer de progresser. Ses réflexions de décembre
quant à sa participation à La Ryder Cup (en fait ses doutes) lui ont donné la
force de s’entraîner plus fort. Ce qui est beaucoup. Il a bien figuré dans les
tournois où il s’est engagé en 2018.
Que
faut-il de plus pour s’approcher de la stature du gagnant ? Type Dustin
Johnson, Jordan Spieth, Rory McIlroy…. Devenir différent.
Pas
évident du tout de digérer notre éducation judeo-chrétienne basée sur la peur
et le reproche. Le joueur de golf de 20 ans a recueilli un nombre d’heures de
remarques négatives qui lui plombe la vie : 8 remarques négatives par jour
pour 2 remarques positives selon les chercheurs. Le pragmatisme anglo-saxon et
la mentalité américaine n’ont pas tout à fait les mêmes fondements.
Dans
la progression d’un jeune joueur doué français, beaucoup d’attentions viennent
bouleverser les progrès. Le joueur dans son développement n’est pas armé pour
les difficultés et le travail. Par exemple, il m’a été demandé de préparer de
jeunes joueurs et de passer des heures avec eux pour les faire travailler
autour du green. En clair les faire jouer pendant qu’à côté ils travaillaient
leur swing professionnel avec le Pro de l’académie. L’engagement était que le
HCP serait coupé en deux en moins d’un an en Grand Prix. Ce fut effectif en 3 tournois.
Pour
gagner il faut en premier et très tôt une vision. Pas un rêve, une vision
précise. Le cerveau ne peut mettre en place tous les ingrédients favorisant la
victoire instantanément. L’approche de la victoire demande du temps. Souvent
elle commence enfant. J’ai dans le domaine ma propre expérience…
Il
faut en déceler les contours et ainsi s’y projeter. Par exemple : se voir
remettre la veste verte du Master’s d’Augusta, l’enfiler et s’y sentir bien
dedans. Cette vision va donner au joueur le courage d’affronter tous les
obstacles qui vont se présenter à lui sur le chemin qui reste pour arriver au
but. On comprend déjà que dans ce domaine le cerveau, la créativité, l’estime
de soi sont au service des valeurs que véhicule le joueur.
Dans
le monde sportif tel qu’il est aujourd’hui (les Jeux Olympiques d’Hiver le
montrent) la victoire est aléatoire, elle va se présenter à celui ou celle qui
l’a le mieux appréhendée. Le sportif doit cependant au plus haut détester
l’échec et ne rien oublier en chemin.
Le
chemin est pavé d’objectifs partiels. Construire un objectif demande une grande
lucidité et pour un champion en devenir il ne se construit pas seul. Il a des
phases d’évolution, des paliers. Moments de difficultés qui retardent la
progression de l’athlète. Ces paliers sont l’expression de tensions
physiologiques et psychologiques qui montrent les déséquilibres du jeune
joueur. Les déceler, les corriger devient important. Les techniques d’intervention
sont connues ; encore faut-il être attentif pour les déceler puis les
traiter. Si les américains ou les coréens savent faire nous sommes un peu moins
au point.
La
tendance française est de mettre les joueurs dans un cocon sans s’occuper de
son équilibre et de sa responsabilité. L’organisation fait que les jeunes
champions sont entourés, ont des droits mais avec des devoirs pas toujours
correctement définis. Cela nuit à leur évolution future et en particulier au
passage entre système amateur et professionnel. Dans ce domaine les dirigeants
et les parents n’insistent pas sur l’équilibre à avoir pour l’adolescent de
préparer l’après sport. L’éducation n’est pas assez poussée de mon point de
vue. Je ne sens pas chez les joueurs de golf ce que je ressens en écoutant ou
regardant des athlètes comme Martin Fourcade, Teddy Riner, Renaud Lavillenie ou
Kevin Mayer…
Nos
phases d’éducation entre la naissance et l’âge de 6-7 ans sont en cause.
L’esprit du sport n’est pas un élément d’éducation suffisamment pris en compte.
La notion de jeu éducatif n’est pas prise en considération dans la formation
des enfants. Ils n’apprennent pas la liberté, la créativité, l’affrontement aux
difficultés par eux-mêmes comme ils le pourraient. C’est l’apanage de la
formation anglo saxonne. Chaque être humain est unique et il a des subtilités à
découvrir en lui-même. Ce n’est pas l’éducation militaire ou stéréotypée qui
peut les créer. Le jeu offert par un sport individuel et collectif le permet.
Ces
manques de connaissance de soi apparaissent à l’âge adulte dans l’expression de
l’estime de soi qui a trois piliers : l’amour de soi, l’image de soi et la
confiance en soi. Pour moi c’est ce dernier pilier qui fait la précocité. Les
jeunes médaillés de tous horizons ont grandi dans l’esprit de victoire en
confiance sans se poser de questions. C’est encore vrai aux Jeux Olympiques ce
matin. C’est pour durer que les deux autres volets de l’estime de soi ont de
l’importance, quand la maturité vient avec la notoriété.
Pour
un champion, c’est plus dur qu’il n’y paraît de résister à la pression de la
vie médiatique. Une organisation qui est un casse-tête permanent. Qui pousse
certains à s’expatrier ou se cacher pour se préparer sereinement ? Trop de
gens pensent que les problèmes financiers obnubilent les joueurs. Je n’en suis
pas persuadé maintenant que leur entourage en soit avide ne m’étonnerait pas.
Un joueur à son projet et c’est pour cela qu’il gagne. Il est face à lui et ses
imperfections, sa vulnérabilité.
Le
golf pour cela est un merveilleux révélateur car il est très interactif, rapide
à comprendre et met le joueur dans son environnement de responsabilité. Pour
être au meilleur de ses possibilités le joueur doit être équilibré :
technique, physique, psychique, mental et émotionnel doivent matcher ensemble.
Tout cela pour donner le meilleur de lui-même. Il doit en plus être lucide sur
le fait que le résultat et la victoire ne lui appartient pas.
Amateur,
vous êtes-vous trouvé dans un petit de nos tournois en position de leader et un
dernier tour à jouer ? Un Grand Prix ou seulement quelque chose qui vous
tient à cœur ? Comment vous êtes-vous préparé ? Quels sont les
sentiments que vous retenez ?
Personnellement
j’ai cette expérience pour l’avoir vécue à plusieurs reprises, dans mes clubs
et à l’étranger. Le challenge j’adore ça. Il y a une alchimie particulière pour
ne pas perdre ses moyens. Au golf que l’on ait un coup d’avance ou 5 c’est la
même chose, tout peut tourner très rapidement. L’estime de soi joue un rôle
très important : le moindre moment de doute, sur la stratégie, le plan de
jeu, la tactique de jeu, le coup à jouer et l’échec vous tend les bras. Cela illustre l'incroyable dureté de ce jeu.
Comment
conjurer cela face à l’environnement pour le milieu professionnel? L’environnement c’est
l’organisation du tournoi, les obligations médiatiques. C’est le climat du
tournoi, on s’y sent bien ou pas. C’est encore la météo plus que la position
des drapeaux. Ce sera au moment de jouer la partie, la foule qui va suivre les
débats. Comment va-t-elle manifester son soutien ou son antagonisme ?
Dans un tel contexte, le plus important c’est son équilibre
à soi (et son équipier le caddy). L'autre influence est l'interaction qu’il y a avec les autres
joueurs de la partie. Les vibrations qui existent dans le cercle de jeu sont
extrêmement subtiles à analyser et ressentir. Favorables, sans rien dire les utiliser, négatives alors s’isoler. Tout cela prend de l'énergie. Ces interactions sont plus
puissantes qu’il n’y paraît. Cette intuition est d’ordre cérébrale et même
quantique (page à venir).
L’approche de la performance est un savant mélange entre lucidité et
humilité, agressivité et contrôle, attaque et défense, risque et
danger…L’expression du meilleur de soi est dans la nuance. Il faut en avoir
l’expérience. Grâce à l’insouciance la victoire peut venir une première fois,
mais ce n’est pas vrai dans la durée. C'est l'équilibre qui permet de rester au sommet, donner la stature.
Ce
qui va permettre plusieurs victoires c’est la maîtrise de soi, une attitude
sereine qui vous laisse de marbre face aux attaques de l’environnement, le
courage de l’âme, l’accomplissement de sa tâche. Un moment spirituel auquel il
n’est pas attaché suffisamment d’importance dans la préparation des sportifs.
Les joueurs All Blacks en sont la meilleure image, mais aussi les athlètes
noirs souvent parce que les plus expressifs dans leurs croyances.
Croire,
avoir la foi en soi est un ingrédient important qui se construit enfant et parents, nous
l’oublions dans notre manière de les éduquer. Parents nous reprenons ce que
l’on connaît et je suis en train de dire que pour créer un champion il faudrait
changer notre manière d’éduquer. Teddy Riner, Tiger Woods ont eu très tôt des
assistants compétents qui associés à leur talent ont donné les champions
d’exception qu’ils sont. Je dis que l’on pourrait faire cela aussi avec nos propres enfants (un livre à venir sur ce sujet...).
Gagner
en fait c’est savoir se diriger, prendre un chemin qui nous plait et l’arpenter
avec toutes ses difficultés et arrivé au bout savourer. Puis enchaîner avec la recherche du progrès permanent. pas une utopie ou des mots mais un comportement. Trouver le plaisir pour encore travailler plus fort. Etre
champion de sa vie c’est bien ce qui est le plus important.
Nos
joueurs de golf n’ont pas gagné ce dimanche. Ce sont de bons joueurs gagnant
leur vie sur le circuit. Ils font leur métier du mieux qu’ils peuvent,
parfaitement respectable. Bien des gens qui les critiquent souvent par ignorance
en font beaucoup moins qu’eux.
Je
regrette que la plupart d'entre eux hésitent toujours à tenter le circuit aux USA. Le vrai test est le PGA Tour.
Certainement une souffrance sur de nombreux points mais qui mérite d’être approchée. Seul, pas adulé, anonyme dans tous ses mouvements ils pourraient
trouver leur vérité et faire encore des progrès. Le progrès est dans l’échec
correctement analysé pour vite se relever et corriger sa manière de penser.
Je
reste optimiste pour Alex Levy qui montre dans son attitude de joueur un réel
changement. Les statistiques sont importantes, son discours s’est nuancé . Il
reste enjoué non sans avoir mis un zeste de « sériosité » dans sa
manière de s’entraîner (c’est dans ce domaine qu’il a perdu du temps). Pour le
reste, si j’avais un conseil à lui donner, je lui dirais d’investir dans deux
domaines particuliers. Sa manière de s’alimenter et de s’ouvrir à sa
spiritualité, de compléter son bagage émotionnel. Il suffirait qu’il rencontre
des coaches ou thérapeutes qui ont aidé d’autres champions.
Quand
je le vois jouer, se déplacer il lui manque un peu de stature pour montrer qui
il est. Il ne rayonne pas assez, les joueurs d’à côté ne le craignent pas
assez. Il n’a pas encore trouvé sa singularité. Il a encore besoin de se
développer pour encore plus s’affirmer. Mais sans conteste je le trouve en
progrès comme je le pensais dans les pages écrites l’an dernier. Sur le Circuit
Européen sa prochaine victoire est en chemin.
Gagner
ne vient qu’après avoir longtemps perdu, Sergio Garcia ne me contredira pas !
Bon
golf à tous !
https://youtu.be/QK2Xx8tOuMs
https://youtu.be/QK2Xx8tOuMs
Pour mieux vous entraîner lisez « Le golf au cœur »
(Jouer au golf autrement)
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