59 - Golf moderne...Dur dur (30 novembre 17)


Bonjour à tous,

Comme je vous l’ai dit sur Facebook, « Golf entre deux mondes » est installé autour du Golf de Miraflorès à quelques kilomètres de Marbella. Je m’engage à vous aider à prendre du plaisir, et faire grandir l’estime de soi en jouant au golf. Pour ceux qui veulent prendre un engagement fort avec eux-mêmes, leur donner les clés pour « casser » leur index comme jamais ils n’ont imaginé qu’ils pourraient le faire… Je détaillerai dans une prochaine page.

Pour le moment, je veux réagir à un article du Journal L’Equipe parce que j’ai de la peine. J’ai été choqué du discours d’Alex Levy il y a quelques semaines et voilà que je relis pour la troisième fois celui de Mike Lorenzo-Vera. Il n’y va pas par quatre chemins comme à son habitude : « Le British Open m’a fait mal à la gueule… ». L’un et l’autre à l’approche de la Ryder Cup à Paris dans 10 mois constatent qu’ils ne sont pas au niveau pour se qualifier sportivement.

Prises de consciences soudaines qui font suite aux polémiques de l’an dernier avec François Illouz sur la capacité des golfeurs français à gagner de grands tournois. Ces deux déclarations sont un aveu d’impuissance et un constat d’échec quant à leurs rêves de joueurs professionnels (et d’enfants). Ils ne se plaignent pas de leur niveau de vie, ils se plaignent de leur niveau de jeu. Ils constatent en comparant leur attitude face aux grands joueurs du monde. Pour les rejoindre, ils sont face à un mur qui leur paraît difficile à franchir. Ils constatent qu’ils n’ont pas les compétences nécessaires.

Au practice du dernier The Open, Mike s’est vu à la rue entre Rory McIlroy et Dustin Johnson. Les uns jouent facile et lui rame pour jouer dans la même cour. L’estime de soi en prend un sacré coup, le constat déstabilisant. Le garçon ne manque pas de talent, capable de passer le cut dans des conditions météo dantesques. Il constate lui-même qu’avec le gap de compétences approprié il ne peut pas espérer les premiers rôles, il n’en a pas le jeu. Il constate de visu qu’il s’est trompé et on l’a trompé…Dur pour le moral et son expression est sans concession.

Problème technique de swing. Pas le swing assez solide pour mettre la balle où il veut. Problème récurrent depuis des générations, pas de niveau d’expertise suffisant de nos éducateurs. J’ai entendu un jour au Golf de La Forteresse notre ami et conseil Michaël Wolseley (Ancien joueur du circuit Européen et Directeur du Stade Français), parler de swing des joueurs professionnels américains ou britanniques : « ils se construisent un swing incassable ». Il est aux USA aujourd’hui et a refusé des avances de grands joueurs, question de bruit autour d’eux. Il travaille dans son centre d’entraînement 35 heures par semaine tout au long de l’année pour bâtir pour ceux qui le veulent des swings incassables pour des joueurs de tous âges. J’y ai passé un mois en 2014. Il n’a pas changé ses exigences techniques d’une rigueur chirurgicale depuis qu’il m’a permis de descendre à un bon niveau amateur (Index USA 2,5 à plus de 65 ans sous un soleil permanent).

Le constat de Mike est celui d’un échec, il comprend que l’intensité qu’il aurait dû avoir dans sa formation de base n’est pas dans la bonne direction. D’autant plus douloureux peut-être qu’il a travaillé avec son frère Frank. Ce que j’ai pu constater depuis que 30 ans que je joue c’est que le swing d’un amateur et celui d’un professionnel n’a rien à voir. Pour ce dernier le niveau d’exigence entre puissance et précision est d’une extrême rigueur. Il faut casser des barrières psychologiques chez le joueur au practice. Il était élevé avec Nick Faldo et il est devenu encore plus grand avec les nouvelles générations de joueurs, voir le travail fait dernièrement entre Butch Harmon et Dustin Johnson. Le swing de golf du joueur professionnel est autant une construction en osmose du corps et de l’esprit du joueur. Elle tient de l’art du sculpteur ou d’artiste peintre. Une expression de l’âme pour être encore plus clair. Il est bâti et programmé pour un projet conscient ou inconscient…

Je viens en Andalousie depuis 1990, j’ai vu les joueurs andalous dans leur championnat, se tirer la bourre mais aussi partager. Severiano Ballesteros a été un aiguillon pour JM Olazabal. L’atypique Miguel-Angel Jimenez continue la lignée et partage avec les jeunes joueurs espagnols et les coaches influents du pays. Avec ces trois joueurs et les coaches qui les ont découverts, les références sont en place. Il y a une filiation des joueurs espagnols. L’éclosion d’un Jon Rahm est significative. Formé en Espagne et affiné aux dures réalités de la vie américaine. Le niveau d’exigence y est d’une rare dureté. Nous pourrions faire une les mêmes remarques pour la Suède…

Notre choix de vie français n’est pas de l’ordre de celui des Espagnols. On adule les talents au lieu de les inviter à s’engager dans ce qu’ils aiment à fond et au plus haut. Nous avons quelques extra-terrestres nés de leur différence mais dans d’autres disciplines. Remarqués par des étrangers Noah par Arthur Ashe. Maintenant qui imagine la dureté du travail de Teddy Riner ? Avec des références comme David Douillet ou même les divers champions de judo dans les autres catégories. Il est aidé depuis l’âge de 14 ans par la même coach de préparation mentale, Meryem Salmi. Du vrai professionnalisme.

Mike Lorenzo-Vera travaille avec cette même coach, depuis moins longtemps certes mais cela fait tout de même apparaître clairement les carences techniques : « je ne sais pas où va sortir ma balle sur le drive ». La prise de conscience de Mike n’est pas fortuite, pas plus que celle d’Alex Levy avec Pete Cowen : pour progresser il faut identifier les lacunes !

Pour les jeunes talents nous n’avons pas un niveau de formation suffisamment professionnel malgré les progrès qui ont été faits. Nous ne mesurons pas exactement ce qu’est le niveau du talent. A partir du moment où un talent est détecté nous le mettons sous cloche en réserve : protégé. Ce n’est pas de mon point de vue la bonne méthode. Je ne suis pas un tortionnaire pour faire du champion à tout crin. Je dis que pour les enfants de génie avec ce que l’on sait aujourd’hui des neurosciences et de la médecine nous serions capables de mettre un plan de développement en place pour permettre à un enfant d’éclore dans sa passion. Le sport est aussi un domaine politique. Je dis qu’avec les précautions nécessaires un champion peut-être formé aujourd’hui en respectant sa passion (fil motivationnel indispensable) et en respectant son être (âme) : niveau culturel et social pour lui préparer un avenir servant à la foi son développement personnel et celui du reste du pays.

Nous avons sectorisé le jeu en technique, physique, psychologie, gestion des émotions et le niveau culturel des joueurs et joueuses jeunes…Tous dans le même bain, pas idéal pour accompagner les gamins et surtout franchir cette barrière psychologique difficile de 17-20 ans. Dans cette période il y a des pertes en ligne dans tous les secteurs sportifs, individuels et collectifs. Manque de repères au niveau de l’exigence professionnelle. Maturité d’apprentissage qui manque aujourd’hui aussi au plan des métiers soit dit en passant.

Notre pays a une relation peu mature avec le succès : prompt à monter au pinacle et à descendre en flamme les talents . Alors qu’il y a besoin pour un jeune athlète d’entourage professionnel complet très tôt. Cela passe par des objectifs précis sur des étapes avec des résultats, encourager et bousculer justement, avec empathie mais fermement. L’éducation scolaire doit avoir une juste place pour équilibrer les difficultés des jeunes joueurs pour servir de dérivatif et prévenir de l’avenir.

Important d’accompagner mentalement les jeunes esprits pour développer leurs connaissances d’eux-mêmes. Pas si évident d’être différent (voir le cas Victor Dubuisson) pour un gamin pétri de talent. Estimer la dose de travail en fonction de l’état d’esprit de chaque athlète, les aspects qualitatifs face à sa vérité psychologique un monitoring très spécial.

Pour être un joueur complet très tôt, il y a une assistance à assurer, parentale et fédérale pour créer une identité véritable. La dureté de la vie professionnelle du circuit demande une organisation précise qui peut s’anticiper, se préparer. Passer un cut à chaque tournoi n’est pas évident demande une organisation mentale tout à fait minutieuse, une confiance en soi qui se bâti. La connaissance du cerveau est aujourd’hui suffisante pour préparer. L’engagement du gamin est total dans son jeu, c’est sa profession mais surtout sa passion. C’est dévorant, il a besoin d’être assisté techniquement mais aussi mentalement. Certains parents savent le faire mais pas tous. Les Anglo-saxons avec leur pragmatisme savent faire cela avec plus de facilité que nous. Les cellules qui savent fonctionner ainsi sont l’œuvre d’exception. Ce n’est pas une question d’argent, c’est une question de projet. Le projet bien monté trouvera l’argent, c’est une loi universelle.

Le haut niveau n’est pas compris de la FFG parce que la plupart des élus sont des gens de bonne volonté mais des joueurs moyens. Il suffit de se promener pour constater que les parcours sont encombrés de nombre de pratiquants de faible niveau dans tous les pays. Quand vous annoncez un Index à un chiffre les gens ne veulent pas jouer avec vous, pour ne pas vous gêner. J’ai eu cela en Ecosse, Australie et même Californie. Foutaise, le golf ce n’est pas cela : c’est le parcours et moi, mais une clé sociale, une vraie rencontre avec les autres joueurs.

Sur la plupart des parcours aujourd’hui c’est la carte de crédit qui est nécessaire pas le niveau de jeu. Pourquoi 75% des joueurs arrêtent-ils au bout de 2 ans ? Pourquoi passe-t-on 5 heures et plus dans certaines compétitions ? Qui se pose la question ? Il y a bien deux manières de jouer au golf, le loisir et le sportif. Notre tendance est loisir en France et nous ne sommes pas près d’avoir de grands représentants. La Ryder Cup sera un éclairage momentané mais n’apportera pas de prise de conscience sportive suffisante pour créer des vocations nouvelles.

La réflexion des deux meilleurs joueurs de l’année va peut-être faire bouger les lignes. En tout cas je l’espère, je souhaite surtout que les meilleurs joueurs fassent l’effort de devenir ensuite des coaches de bon niveau. Personne en France n’est ne mesure d’enseigner avec ses tripes dans ce domaine. Voyons comment s’en sortira Thomas Levet…le premier à se mouiller à ce niveau. Il a des lueurs de haut niveau, mais il doit encore monter la barre pour faire agir les autres jeunes joueurs. Nous n’aimons pas la douleur, or être champion est un long chemin de souffrance et de sacrifice…

Bon golf à tous mais « osez changer ! », vous verrez comme c’est bon de mettre la balle où on le souhaite. Jouer 18 ne pose aucun problème, jouez dans et avec votre tête, c’est bien plus simple.



Michel Prieu

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